2015년 9월 9일 수요일

Pensées d'une amazone 10

Pensées d'une amazone 10


J'entendis le sibilement du liquide dévalant les sables comme s'il
s'adressait à moi en son chuchotis pour me féliciter._
 
«_Car celui que j'aime le plus au monde dormait auprès de moi, sous les
mêmes couvertures dans la nuit fraîche._
 
«_Dans le silence, sous les rayons de la lune automnale, son visage
était tourné vers moi._
 
«_Et son bras entourait légèrement ma poitrine, et cette nuit-là je fus
heureux._» (_Feuilles d'herbe_, trad. Bazalgette, tome I, page 167,
_Mercure,_ 1909).
 
On connaît:
 
«_Tes yeux las se sont clos, ô visage parfait._
_Te contemplant ainsi, j'écoute, ô mon amante!_
_Comme un chant très lointain ton haleine dormante._
_Je l'entends, et mon cœur est doux et satisfait._»
de Renée VIVIEN.
 
et l'émouvant sonnet de Verlaine à Rimbaud:
 
«... _Bouche qui ris en songe sur ma bouche ..._» ainsi que son «_Laeti
et Errabundi_», dans «_Parallèlement_, où tout leur roman est donné à
entendre:
 
«_Car les passions satisfaites_
_Insolemment, outre mesure_,
_Mettaient dans nos têtes des fêtes_
_Et dans nos sens, que tout rassure_,
«_Tout, la jeunesse, l'amitié_,
_Et nos cœurs, ah! que dégagés_
_Des femmes prises en pitié_
_Et du dernier des préjugés..._
 
mais voici que:
 
«_L'envie aux yeux de Basilic_»
 
s'en mêle:
 
«_On vous dit mort, vous. Que le diable_
_Emporte avec qui la colporte_
_La nouvelle irrémédiable_
_Qui vient ainsi battre ma porte!_
 
«_Je n'y veux rien croire. Mort, vous_,
_Toi, dieu parmi les demi-dieux!_
_Ceux qui le disent sont des fous!_
_Mort_, mon _grand péché radieux..._»
 
Verlaine est l'esclave de «l'_époux infernal_», que les parents trop
soucieux de sa bonne réputation ont ridiculement voulu prouver chaste.
Chaste en l'honneur de qui, de quoi?
 
«_On ne se retire pas du monde à deux pour être chaste, mais on l'est
peut-être devenu du moment qu'on aime, parce que le corps que l'on
aime prend une valeur telle qu'on ne peut le qualifier par des mots
impudiques... Pour Verlaine, les relations sexuelles deviennent
chastes lorsqu'elles sont dictées par l'amour, et il ne confond
nullement l'amour avec le besoin physique. L'amour est chaste, quels
que soient ses gestes._»
 
(_Lettres à l'Amazone,_ Remy de Gourmont).
 
«_Vous qui me jugez, vous n'êtes rien pour moi._
_J'ai trop contemplé les ombres infinies;_
_Je n'ai point l'orgueil de vos fleurs, ni l'effroi_
_De vos calomnies._
 
«_Vous ne saurez point ternir la piété_
_De ma passion pour la beauté des femmes,_
_Changeantes ainsi que les couchants d'été,_
_Les flots et les flammes._
 
_«Rien ne souillera les fronts éblouissants_
_Que frôlent mes chants brisés et mon haleine._
_Comme une Statue au milieu des passants,_
_J'ai l'âme sereine._»
 
dit Renée Vivien
 
dans «Le Dédain de Psappha»
 
Et dans: «A l'Heure des Mains Jointes»:
 
«... _Vois: j'ai l'âge où la vierge abandonne sa main_
_A l'homme que sa faiblesse cherche et redoute_,
_Et je n'ai point choisi de compagnon de route_,
_Parce que tu parus au tournant du chemin..._
 
«_On m'a montrée au doigt en un geste irrité,_
_Parce que mon regard cherchait ton regard tendre._
_En nous voyant passer, nul n'a voulu comprendre_
_Que je t'avais choisie avec simplicité._
 
«_Considère la loi vile que je transgresse_
_Et juge mon amour, qui ne sait point le mal_,
_Aussi candide, aussi nécessaire et fatal_
_Que le désir qui joint l'amant à la maîtresse..._
 
«_Laissons-les ausouci de leur morale impure..._
 
«_Nous irons voir le clair d'étoiles sur les monts..._
_Que nous importe a nous le jugement des hommes?_
_Et qu avons-nous à redouter, puisque nous sommes_
_Pures devant la vie et que nous nous aimons?..._
«En débarquant à Mytilène»,
«_Reçois dans tes vergers un couple féminin..._
«_Ile mélodieuse et propice aux caresses..._
_Parmi l'asiatique odeur du lourd jasmin,_
_Tu n'a point oublié Psappha ni ses maîtresses..._
_Ile mélodieuse et propice aux caresses._
_Reçois dans tes vergers un couple féminin..._»
 
«_Mes mains gardent l'odeur des belles chevelures._
_Que l'on m'enterre avec mes souvenirs, ainsi_
_Qu'on enterrait avec les reines leurs parures.._
_J'emporterai là-bas ma joie et mon souci..._
 
(Renée Vivien: «A l'Heure des Mains Jointes».)
 
 
Lord Alfred Douglas dit au «Poète Mort» (Oscar Wilde):
 
_Cette nuit, j'ai rêvé de lui, j'ai vu sa face_
_Rassérénée enfin, sans ombre ni tourment_,
_Musique de jadis qui chante éperduement_
_J'entendis sa voix d'or, et son verbe qui trace_
_Sous les vulgarités, l'insoupçonnable grâce._
_Cette voix fait du vide un émerveillement_,
_Revêt tout de beauté comme d'un vêtement_,
_Et le monde n'est plus. La fable le remplace._
_Plus tard il me sembla qu'au dehors d'une grille_
_Je regrettais les mots perdus, à peine nés_,
_Mystère à moitié dit, et que l'heure éparpille._
_Ces contes, oubliés, qu'il contait sans effort_
_Tels des oiseaux chanteurs, étaient assassinés_,
_Ainsi je m'éveillais sachant qu'il était mort._
 
(Trad. N. C. B. dans «Le double Bouquet»).
 
 
Whitman dit encore dans «Calamus»: «_Je suis celui qui brûle d'amour._»
 
Les êtres qui brûlent d'amour sont purs, purs comme les flammes.
 
Pendant la guerre civile aux Etats-Unis, dans «Drumtaps», page 250,
Whitman, qui n'est obsédé par aucun atavisme romantique de damnation,
comme par exemple Baudelaire (Femmes Damnées, Lesbos, etc.) (_Fleurs
du mal,_ nouvelle édit. Crès) accueille ainsi un adolescent dont il se
sent épris au premier regard échangé:
 
«_O garçon des prairies au visage hâlé_,
«_Avant ta venue au camp, bien des dons arrivèrent et furent bien venus:_
«_Des louanges et des présents, avec de la nourriture substantielle, puis_,
[_enfin parmi les recrues_,
«_Tu vins, taciturne, n ayant rien à donner, nous nous sommes regardés_
[_seulement_,
«_Ah! tu me donnas plus que tous les cadeaux de ce monde!_»
 
Ceci rappelle un peu l'innocence théocritéenne: «_Au retour de chaque
printemps, réunis autour du tombeau de Dioclès (l'amant célèbre),
les jeunes gens se disputaient le prix des baisers. Celui qui a su
appliquer le plus délicieusement ses lèvres sur les lèvres, revient à
sa mère chargé de couronnes..._
 
«... _Sans doute ses instantes prières invoquent Ganymède aux yeux
brillants, pour que sa bouche ressemble à la pierre lydienne qui
apprend aux changeurs à bien reconnaître l'or pur._»
 
Quel est l'écolier qui n'a pas appris dans Virgile que _le berger
Corydon aimait le bel Alexis_»? Quel serait cependant l'étonnement
scandalisé de son professeur s'il l'entendait faire desemblables aveux!
 
Non seulement les jeux bucoliques, mais aussi des courages guerriers
s'inspirent de cet amour.
 
Platon désirait que les armées fussent composées d'amants, car quel
amant oserait paraître lâche devant son bien aimé!
 
«_S'il arrivait, par quelque enchantement, qu'une ville ou qu'une armée
ne comptât que des amants et des aimés, il serait impossible que cette

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