2015년 9월 9일 수요일

Pensées d'une amazone 19

Pensées d'une amazone 19


Comment la quitter? Elle voit que je veux m'en aller, et c'est elle qui
s'en va. Si je m'en vais elle me tourne le dos, je ne puis la laisser
partir ainsi. Elle m'irrite, et c'est elle qui pleure: à elle toutes
les voluptés. Elle pleure aussi parce que ce n'est pas juste que je
ne l'irrite pas au moins un peu. Que sa face m'énerve, que son dos
m'attendrit et me crispe tour à tour, puis tout à la fois. Ah! ses
épaules comme découragées, voûtées par moi? par d'autres? par tout ce
qui lui arrive ou ne lui arrive pas? Elle s'en va, oui décidément...
Ne pas la poursuivre? Ce serait la poignarder entre ses deux frêles
épaules: en amour les crimes passifs comptent... Mais si je la ramène,
sa crise passée, elle me croira, et la fin sera à recommencer.
 
A certaines heures mes ailes se lassent de nous suffire à tous deux: la
laisser retomber où elle voudra; planer seul,--on plane toujours seul.
 
Guignols de ses viscères, ses bras mus par leurs fils bleus.
 
Ils pleurèrent, car ils s'étaient fait de la peine. Et chacun pensait
à sa propre peine, et voulut s'en consoler ensemble--sans seulement
remarquer celle de l'autre. Les larmes rendent aveugle, et c'est
toujours sur d'autres, mais pour soi, que l'on pleure (lire de
l'évangile «Woman, why weepest thou?»).
 
Son art: jouer des êtres, non s'en jouer.
 
Sa persistance de sadique mental fut telle qu'il arriva à la faire
pleurer--avouer la secrète volupté que lui causent ses larmes? Faire
souffrir à la condition de bien faire souffrir, de façon satisfaisante,
mais celles-là seules pour qui nous pouvons toutes les joies!
 
Craindre sans cesse quelque mauvais tour de sa vitalité, tout imprégnée
du sel de la mer? C'est de la marée haute que deux fois par jour
Aphrodite est rejetée sur le rivage.
 
 
Elle avait de ces yeux du nord, de ces yeux qui ne s'étonnent pas,
qui seuls savent prendre; des yeux, tristes et impérieux, expressifs
seulement d'une partie de son être.
 
Lui ayant trouvé une résonnance nerveuse digne de sa maîtrise et de sa
dextérité, elle s'exerçait sur ses cordes sensibles plus volontiers
que sur d'autres, car elles répondaient, en parfait instrument de
souffrance, à la moindre inflexion cruelle.
 
 
Son buste arqué et modelé à la façon des violons sonores.
 
Il ne faut pas vouloir le mieux: en jouant du violon on remarque que
c'est du grincement que provient le son.
 
Elle a tout reflété comme ces ondes passives dont on pourrait écumer
les images afin d'en faire apparaître d'autres? Ses profondeurs ne
servent qu'à cela, non à faire transparaître le fond. La vie qui se
penche vers de tels êtres est trop opulente.
 
C'est à cause d'elle que je suis dans ces hôtels où, malgré les
sonneries électriques, les ascenseurs les voisins, je subis un calme si
reposant. A cause d'elle, que je ne m'aperçois ni du temps qu'il fait,
ni de ce que je mange. C'est à cause d'elle que sans sortir, j'écris
des vers, heureux comme un poète sans génie, tandis qu'un garçon
suisse, allemand, polyglotte, que sais-je? d'une table où le surtout
et mon nécessaire se touchent--dessert. C'est à cause d'elle que je
marche, comme dans certaines visions, à quelques mètres au dessus de la
terre,--et elle s'imagine que c'est _pour elle_ que je l'aime!
 
Vous tendez votre cœur comme une petite coupe vers la vague que je
suis. La vague déferle, et à cause de sa force qui surpasse ce que vous
en attendez, ne laisse qu'un peu d'eau amère au fond.
 
Notre passion suit son évolution: je sens que bientôt nous serons dans
la triste saison des pleurs.
 
_Sadisme mental:_
 
... Toutes ces mauvaises paroles que l'on se fait avec
l'ombre,--sadisme des esprits! (se simplifier ou se compliquer jusqu'à
la sensation? alliages!) Tout à coup, et sans l'avoir voulu, tu
m'étreins en plein corps. Je suis transpercée par les flèches de tes
seins, tes côtes, ossature souple, tes nerfs dont mes mains tirent des
arpèges. Ta chair s'exalte comme une religion.
 
Je cueille à l'aube ta rosée... Des sons s'éveillent, le grincement
d'oiseaux, le tintement des cloches--en dehors de ton corps il n'y a
pas de dieu.
 
Pensées de la même journée: La sensualité physique n'est qu'un point de
départ--ou d'arrivée, mais la chair seule nourrit mon esprit amoureux,
et satisfait d'elle, je ne sais prendre d'autre subsistance.
 
 
Il connut l'égoïsme amoureux qui préfère plutôt perdre ce qu'il aime
par la mort que par la vie.
 
 
Ceux qui aiment autrement, n'aiment pas amoureusement, ou, plus
clairement: aiment, mais ne sont pas amoureux.
 
S'ils ne tremblent pas, s'ils ne doutent pas, s'ils ne craignent pas
sans cesse le changement ou l'infidélité de l'aimée, si, voyant tomber
un cil, ils ne le ramassent pas pour souffler dessus, afin d'apprendre
si leur vœu reste ou s'envole; si dans la chute d'une étoile ou d'un
pétale de rose, ils ne pensent pas aux superstitions de l'amour; si
en passant lentement devant la Chambre des Députés--après l'avoir
reconduite à l'aube dans un fiacre somnolent,--on n'énumère pas ses
colonnes avec le traditionnel: un peu, beaucoup, passionnément ... (il
y en a douze, mais l'obscurité aidant, je n'en ai compté que sept) si
par les choses les plus absurdes ils ne cherchent pas à rassurer leur
incertitude, ils sont peut-être des amants selon Sénancour (dont le nom
seul rime avec amour), mais non selon le divin enfant.
 
--Sénancour est tout au plus un bon législateur d'Éros, il a tâché
de classifier et de codifier toute cette incohérence; j'y trouve de
l'agrément, mais l'agrément d'une «nature morte»; la belle proie
éventrée pend par une morne ficelle attachée à sa patte, pour
la contemplation de ceux qui sont attablés devant une volaille,
tandis que les bêtes de race, ingénuement simplifiées, piaffent
poliment aux lointains des tapisseries; tout cela est exact comme un
raisonnement,--tandis que dans l'ordre Stendhalien, on sent le souvenir
vécu, rangé...
 
Amour, lyrisme des sens.
 
Ahuri comme après une chute, le voici seul, libre.
 
Quand me déferai-je de sa démarche?
 
Sur son long cou flexible,--le long coup flexible des êtres libres--sa
tête levée. Levée ainsi pour échapper à quelle angoisse? pour atteindre
à quel miraculeux baiser?
 
La saveur à venir des choses retrouvées?
 
Convalescence: elle ne pleure plus que trois fois par jour.
 
Choix: la jalousie maladie, ou la jalousie parasite--la nôtre ou la
sienne?
 
Un amour brisé rejette ses débris dans des sentiments inusités, ayant
abandonné les centres de notre sensibilité et la fraîcheur des désirs
charnels, nous sommes étonnés de retrouver son intensité renfermée dans
un mot, dans un geste, dans un parfum, dont la répercussion remonte
jusqu'aux sources nerveuses d'un chagrin, que nous croyions tari et qui
jaillit comme dans un torrent de larmes et emporte notre indifférence.
 
Les larmes, cette circulation de notre chagrin qui s'écoule.
 
Myosotis «forget me not», rétréci, attachant et puéril comme ce qu'on
n'oublie pas.
 
La tromper sans joie, avec cynisme, parce qu'elle ne m'aime pas assez?
 
 
Entrer à l'aube, ma Bohème retrouvée, romantisme de la ruelle, quitter
sa petite chambre qui sent l'alcool du fer à friser, au son du premier
cheval battant le parquet en bois de Paris, de ses pas lourds à grelots
... cheval blanc, vieille danseuse...
 
Il me semble glisser à l'intérieur d'une perle à peine irisée, à peine
aérée, ô pénurie du petit jour ... éviter les rôdeurs, ma clef à la
main, puis marcher résolument devant toutes ces maisons closes, de
bourgeois endormis...
 
 
Son corps avaricieux d'adolescente porte le fruit magnifique des seins,
seule maturité où se blottir.
 
Cette actualité de sensations chez lui l'effraie, elle qui ne sait ni
si elle sent, ni où elle sent, ni ce qu'elle sent!
 
Il n'importe pas qu'une chose soit belle, il suffit qu'elle le soit
pour nous, et que nous la portions au plus haut de nous-mêmes.
 
 
Je l'ai mise au-dessus d'elle, hors d'atteinte de ses gestes.
 
 
Libéré de ses vêtements, il respire de tout son corps l'air et la
lumière de ce pays nouveau, se baptise dans les deux azurs sans
marées, se frotte de sable--fragments de pierreries, d'étoiles ou de
coquillages--puis dans une petite hutte faite de joncs desséchés, il
oint d'huile d'olive ses bras et ses jambes nourrissant ses musculaires
serpents, qui faisaient sa jeunesse, son courage et sa force.--Il est
probable qu'Hercule enfant, au lieu d'étouffer les serpents de son
berceau, les glissa sous sa peau, où ils sont toujours prêts à revivre,
à étreindre, à étouffer.--Assoupi, il s'étendit et connut un sommeil
mêlé d'odeurs de pin et de bruyère blanche, de mimosa duveté comme des
poussins.
 
A son réveil, il se sent prêt à boire ce soleil liquéfié, à aimer les
vins, à laisser sa sève d'homme du Nord dans la chair olivâtre de
ces femmes. Il songe avec mépris à ses pâles maîtresses des alcôves
parisiennes, à ces chairs stériles et cimentées de crème. Ici, il
lui sembla tout naturel que la femme fût incessamment enceinte, comme
cette nature d'une maturité abondante, presque sans printemps, hâtive
d'atteindre à la matérialité des fruits--à leur vendange, afin de
recommencer.
 
 
_La navrante infidélité_:--Que sais-tu de moi?
 
--Que ce n'est pas vous... Comment sais-tu q 

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